Bien-être au travail : que sera “le monde d’après” ?

On le sait, ce n’est pas un scoop, le Covid-19 (ou LA Covid-19, comme le veut l’Académie française !) et la crise polymorphe qui en découle, a mis le monde à rude épreuve. Elle a également conduit chacun d’entre nous à réfléchir à ses modes de vie et les entreprises à interroger leurs modes de production. Plus que jamais, l’environnemental, le social et l’économique sont imbriqués, à la fois dans la naissance de cette crise, mais aussi dans la réponse à lui apporter. Pourquoi la RSE doit-elle être au cœur des réflexions menées par les entreprises à la sortie du confinement ? En quoi la qualité de vie au travail sera-t-elle un vrai sujet ? À quoi ressemblera “le monde d’après” en entreprise ? Comment le Covid-19 peut-il accélérer la mutation ? Essai de réponse.

Qu’est-ce que la RSE ?

Il y a encore quelques mois, de nombreuses entreprises se servaient de la RSE comme un faire valoir et non comme un réel socle de principes à la base du fonctionnement de l’entité. Avec l’effondrement de l’économie et l’ébranlement de la société qui s’en suit, la RSE pourrait bien être le secret de la résilience de certaines entreprises qui n’avaient jamais remis en doute la pertinence d’une prise en compte systémique des enjeux sociétaux, environnementaux et économiques.

La RSE (responsabilité sociétale des entreprises) correspond à un ensemble d’enjeux, économiques, sociaux, environnementaux et de gouvernance, que les entreprises sont invitées à prendre en compte, dans le cadre de leurs activités internes et dans leurs rapports avec leurs partenaires et prestataires. L’objectif de la RSE est d’inscrire le fonctionnement des entreprises dans une démarche de développement durable, c’est-à-dire de répondre aux besoins actuels des acteurs économiques, de la société et de la planète, sans compromettre ceux des générations futures.

Et si le Covid19 faisait évoluer les entreprises ?

Personne, particulier ou entreprise, n’a été, d’une façon ou d’une autre épargné par la crise liée à l’apparition et à la propagation du coronavirus. Les entreprises ont par conséquent déjà été obligée de s’adapter et de revoir leur ligne de conduite. Les intérêts économiques occuperont une place essentielle dans les plans de déconfinement et de reprise des activités. Il est néanmoins impossible pour les entreprises de repartir d’où elles étaient. Les performances extra-financières devront occuper une place toute aussi importante que les performances financières.

Nous le savons tous, il y aura un avant et un après Covid-19. Les acteurs économiques auront à s’interroger sur le fondement même de leur existence, avant de revoir leur business plan. Quel est le sens de leur activité ? Quelles sont leurs priorités ? Leur développement est-il cohérent ? Leurs stratégies sont-elles pertinentes ? Souhaitent-elles privilégier la sphère économique de leurs activités ou se décider à prendre en compte concrètement et efficacement les aspects sociaux et environnementaux ?

D’une RSE de surface à une RSE sincère

Avec la crise du Covid-19, les entreprises seront plus enclines ou, à tout le moins, contraintes, de repenser leurs stratégies afin de s’engager sur la voie d’un développement économique vertueux. La durabilité passera nécessairement par la mise en application réelle d’une politique RSE, basée par conséquent sur la concrétisation des engagements et non plus sur des principes de façade. L’époque de la “RSE vitrine”, source de différenciation vis-à-vis des concurrents, mais également de gains de parts de marché, pour les entreprises qui la pratiquaient, est une période révolue.

Les entreprises qui avaient déjà fait de la RSE un outil à part entière de leur fonctionnement ont souvent mieux résisté à la crise – qui n’est d’ailleurs pas terminée. Une stratégie RSE bien menée est en effet un gage de souplesse et de performance. L’idéal serait pour les entreprises d’aligner leur politique sur les ODD de l’ONU, qui seraient les nouveaux KPI (indicateurs de performance). Ces dix-sept objectifs de développement durable valent tous les business plan de la terre, comme l’indiquait Paul Polman, à la tête du cabinet de conseil Imagine et ancien PDG d’Unilever. Il s’agirait désormais de prendre autant en compte la santé des collaborateurs que les performances financières, autant le réchauffement climatique que l’innovation industrielle. Aucune économie ne peut, nous venons d’en avoir la preuve, être pérenne, sans prendre soin des individus et de l’environnement. Il est simplement dommage d’avoir dû attendre de connaître une telle situation pour que les acteurs économiques en prennent conscience. S’ils en prennent conscience…

Comment sera “le monde d’après” pour les salariés : une nouvelle ère pour la QVT ?

Laissons-nous un peu aller à rêver ! Si les modes de fonctionnement qui seront évoqués plus loin sont déjà adoptés par certaines entreprises, il ne s’agit malheureusement pas d’une règle générale. De la même manière que nombre d’entre nous espère que le confinement aura conduit les individus à s’interroger sur leurs modes de vie et de consommation, il est légitime d’espérer que la QVT (qualité de vie au travail) ne soit pas qu’un sigle vide de sens.

Une gouvernance collective

La gouvernance collective passe par la communication et la confiance entre les collaborateurs et la direction. Dans cette optique, les salariés se situent à un niveau identique à celui des clients, des collectivités, des fournisseurs ou des sacro-saints actionnaires. Les salariés seraient ainsi, de véritables parties prenantes de l’entreprise. Ils auraient par conséquent une valeur tout aussi importante que la valeur de marché.

Une prospérité partagée

Une politique RSE bien pensée repose notamment sur le partage des gains de l’entreprise. Si l’objectif n’est pas de diviser les bénéfices entre chaque collaborateur – ne rêvons pas ! – il serait bon que chaque étape de la chaîne de valeur puisse profiter de la prospérité de l’entité. Un équilibre doit être trouvé entre les salaires et les dividendes.

Un soutien de toute nature

La qualité de vie au travail ne doit plus être un faire-valoir. S’il est sympathique de mettre en place des coins détente, de redécorer la salle de repas ou d’installer une table de ping-pong, ce n’est pas ce qui rendra les collaborateurs plus heureux. Le vrai bonheur professionnel passe par la reconnaissance de son travail et par l’existence d’un soutien réel de la part de ses n+. Dans le cadre de la crise du Covid ou de l’après-Covid, le soutien est bien entendu financier. Il s’agira également de remercier les volontaires ayant accepté de revenir travailler sur site, mais aussi d’adapter le format de l’activité en fonction des attentes et besoins des salariés ou d’assurer un suivi de santé et psychologique, etc.

Le règne du travail à distance ?

Le “monde de l’après” sera sans conteste un monde de flexibilité et d’adaptation. Les entreprises et les collaborateurs ont dû apprendre à vivre avec le télétravail. Il semble évident que tous ces efforts n’auront pas été vains. Les entreprises réticentes à l’idée de faire travailler des collaborateurs, notamment des managers, à distance auront vu que cette formule n’était pas impossible ni vide de sens. Les directions encore à la traîne sur le plan de l’informatique auront par ailleurs compris qu’une réunion en visioconférence ne relevait pas de l’impossible. Ces avancées permettront probablement à ceux qui le souhaitent de pouvoir associer vie personnelle et professionnelle de façon plus naturelle, en limitant les contraintes horaires ou de déplacement, grâce au travail à distance.

Dans la même veine, la crise du Covid a laissé davantage de place à la responsabilisation et à l’autonomisation. Si certains collaborateurs ont pu se sentir perdus, abandonnés par leur hiérarchie, d’autres y ont probablement trouvé leur compte. Dans le premier cas, il ne reste plus qu’à former les managers, afin qu’ils apprennent à gérer leurs équipes à distance. Dans le second cas, la crise a pu permettre d’offrir davantage de latitude à des salariés qui attendait cela depuis des années.

L’épanouissement

Faire entrer la convivialité, la détente et le bien-être dans l’entreprise faisaient déjà partie des objectifs de politiques QVT de la plupart des entreprises avant 2020. Celles qui avaient délaissé ces aspects n’auront d’autre choix que de s’y mettre. Le déconfinement a bouleversé la façon de voir la vie et le travail. L’ordre des priorités est revu. Si certains se laisseront de nouveau gagner par les démons du profit, de la performance et du perfectionnisme, d’autres salariés aspireront à relâcher la pression et à s’épanouir autant au travail que dans leur vie personnelle. Les entreprises devront plus que jamais créer une ambiance agréable et trouver des moyens de motiver leurs salariés. Primes, avantages en nature, journées team-building ou ateliers bien-être ont de belles années devant eux !

Quand certaines entreprises conservent leurs mauvaises habitudes

Il ne faut toutefois pas croire au Père-Noël. Certaines entreprises laisseront passer le train du “monde d’après” et continueront à juger que la RSE n’a pas à prendre le pas sur la priorité de réduction des coûts et de retour à la performance économique. Elle se tromperont alors une fois de plus de combat, d’objectif. Elles ne profiteront pas de cette crise pour changer, pour évoluer. Il s’agira alors pour leurs salariés de quitter le navire avant qu’il ne coule, afin de rebondir et ne pas sombrer avec le capitaine.

Le salarié a compris, avec le Covid-19, que la vérité est ailleurs. Le sens de la vie, les propriétés, l’essentiel ne se résume pas à un nombre d’heures abattues, à une prime ou à une mutation. Si l’entreprise doit faire évoluer ses priorités, le salarié doit également savoir dire stop. S’il nous a pris beaucoup, le Covid nous a redonné notre esprit critique. A nous de savoir nous en servir !

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